dimanche 15 juin 2014

Seuls au monde ou presque...

De Pak Bara à Ko Tarutao

Après cette drôle de nuit passée à Hat Yai, nous voulions prendre un bus pour nous amener au port de Pak Bara. Nous avons perdu beaucoup de temps à négocier des tuk tuk hors de prix pour finir par trouver un song tao vraiment pas cher nous amenant à la gare routière. Une femme nous indique alors que nous arrivons trop tard et que le ferry sera déjà parti quand nous arriverons à l’embarcadère. Nous décidons de prendre tout de même le mini van, après tout sur un malentendu ça peut marcher.

Une fois sur place, nous décidons d'obtenir le plus d'informations possible concernant le Parc Maritime de Ko Tarutao. Nous sommes été assez surpris de constater que même le bureau d'informations touristiques ne détenait pas tellement d'éléments sur le sujet. On nous a proposé de prendre un bateau privé pour être sur l'île dans la journée mais encore une fois les prix flambent, et au vu de mes finances je ne peux pas me le permettre. Comme on dit "il n'y a pas de petites économies". Nous dégotons donc une petite guest house pour y passer la nuit. Nous avons quand même bien ri : l'imâm qui chante la cantillation coranique version asiatique c'est tout de même quelque chose. On va dire que l'appel à la prière du muezzin est moins élégante que la version arabe.

Le lendemain nous nous dirigeons vers le bateau afin de se rendre sur Ko Tarutao. C'est la plus grande île d'un archipel de cinquante-et-une îles dispersées dans la mer d'Andaman, aux confins de la Thaïlande (tout près de la Malaisie). Classée au Patrimoine de l'Unesco, nous tenions vraiment à nous y rendre car l'île est encore vierge de tout tourisme de masse. Elle a su préserver toute sa beauté sauvage ainsi que sa faune et sa flore. 

L'île en elle-même garde précieusement de nombreux secrets. L'archipel abrite une communauté de pêcheurs : ce sont des Moken ou Chao Lay en thaï, soit des "gitans de la mer". D'autre part, le sud de l'île abrite un trafic d'êtres humains (nous n'avions pas le droit de nous y rendre d'ailleurs). Pour la plupart ce sont des réfugiés birmans Rohingya à qui l'on promet la Malaisie, débarqués ensuite sur les îles peu surveillées de la mer d'Andaman et finalement réduits en esclavage si leur famille ne peut pas honorer la rançon. L'esprit des "pirates des mers" est encore bien présent.



Une fois arrivés près de Ko Tarutao nous nous émerveillons devant  une île complètement sauvage, vierge de toute construction. Des roches immenses fouettées par la mer. Des arbres, une végétation luxuriante et verdoyante. Un palette de couleurs à en faire tourner la tête.

Une fois les pieds à terre, nous avons repris nos bonnes habitudes de "crevard" et nous nous sommes fait passé une fois de plus pour des enseignants. Le prix de l'admission au parc naturel a été divisé par deux (ce n'est pas négligeable).

On arrive alors dans ce qui ressemble à un camp japonais désaffecté. Nombre d'entre vous ont dû voir ou du moins zapper sur la série lost, et bien ça m'y a fait grandement penser. Ici pas de voitures, pas de magasins, pas de bars, le pied quoi. Il y a uniquement des bungalows mis à la disposition des visiteurs par les rangers. Les prix dans un petit bungalow était tout même considérables donc nous avons opté pour la tente. On ne pouvait pas rêver mieux, c'est limite si nous n'avions pas les pieds dans l'eau.



Crocodile Cave


Une fois notre petit campement installé nous avons décidé d'aller explorer la grotte aux crocodiles. Nous avons alors loué un kayak. Après m'être pris quelques petits coups de pagaie dans la tête et traversé de magnifiques mangroves, nous sommes arrivés à la dite grotte aux crocodiles. J'avais franchement l'impression d'être dans un documentaire d'Arte.


Comme l'indique son nom, la grotte aux crocodiles était à l'époque occupée par ces reptiles. La cave jouissant d'une fraîcheur ambiante et d'une eau rafraîchissante nécessaire au ravitaillement des pirates. Tout le long de notre traversée nous étions comme seuls au monde.



Sans rangers ni touristes, Manu en a profité pour faire son explorateur en herbe : détacher le petit radeau en plastique afin d'atteindre les profondeurs de la cave.


Je me suis donc aventurée à le rejoindre non sans peur car il y avait de nombreuses chauves-souris (je craignais qu'elles s'accrochent dans mes cheveux). Je me suis donc initiée au port du voile. Ceci dit merci à Manu de m'avoir motivée car le spectacle en valait la peine. Des stalactites et stalagmites vraiment splendides.



De retour à notre campement nous avons dîné face à la mer tout en admirant le coucher du soleil. Plus tard dans la soirée, j'ai voulu aller me faire un bain de minuit et là MAGIE : du plancton bioluminescent qui s'allume à chaque mouvement dans l'eau. J'ai donc été réveiller Manu afin qu'il profite aussi de cette féerie naturelle sur l'île aux pirates.






Randonnée à vélo 


Nous voulions visiter l'île à pied mais au vue des chemins sinueux et montagneux nous avons opté pour une randonnée à vélo. Dans un premier temps nous nous sommes arrêtés à Ao Talo Wow afin d'admirer cet énorme rocher complètement détaché de la côte, avec des parois complètement lisses. Nous avons ensuite été visiter les restes du pénitencier.




Je dois reconnaître qu'il y a quelque chose de troublant sur cette île, une atmosphère particulière qui n'est pas vraiment palpable. Ko Tarutao est chargée d'histoire et de légendes fabuleuses. C'est ce folklore-là que nous étions venus chercher. Dans un premier temps elle fut le repaire de pirates puis de 1938 à 1948 elle servit de pénitencier pour les opposants politiques. Durant cette période plus de 3000 prisonniers thaïs ont été détenus. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les approvisionnements en vivres et médicaments ont cessé, occasionnant des centaines de morts. D'après ce qui se dit les prisonniers et les gardes auraient pactisé pour devenir des flibustiers craints par tous les bateaux de commerce voguant aux alentours. Il faudra d'ailleurs l'intervention de la flotte britannique pour venir à bout des mutins.




Ko Tarutao était naguère crainte pour ses crocodiles, ses requins et surtout ses moustiques qui étaient porteurs de malaria. L'endroit parfait pour créer un pénitencier à ciel ouvert. Nous nous sommes donc promenés de baraque en baraque tout en apprenant un peu plus sur l'histoire et la vie de cette île prison. Au travers des vestiges du pénitencier nous avons pu nous recréer notre petit film à nous, imaginant ce qu'étaient leurs vies en pleine jungle, au milieu de rien.

A l'aller comme au retour nous avons rencontré de nombreux singes, sangliers, et autres espèces. Bon je dois avouer que j'avais du mal à suivre la cadence, je suis descendue plusieurs fois de mon vélo tellement la montée était ardue. J'ai fait l'erreur de dire à Manu, "vas-y ne m'attends pas" et je l'ai amèrement regretté, j'ai déraillé en pleine montée, impossible de remettre la chaîne. Dans le même temps je me faisais attaquer par d'énormes fourmis tropicales ainsi que par les singes qui peuvent être parfois assez agressifs. Ceci dit j'ai pu voir un gros singe noir avec le ventre blanc dans la canopée !

Le lever du soleil... oui mais non !




Nous nous sommes levés très tôt pour monter au point de vue qui soit-disant devait nous permettre d'admirer le lever du soleil. Au final nous ne l'avons pas vu mais nous avons eu la visite de nombreux singes. Une bonne vingtaine de Langurs venus nous faire un petit bonjour. Nous savions qu'ils étaient réputés pour être des voleurs hors-pair mais là je me suis fais surprendre. J'étais en train de prendre des photos d'une femelle avec son bébé et nous avions laissé nos sacs ouvert. Ni une ni deux un des singes a pris mon deuxième objectif et a filé. J'étais pour ainsi dire "verte", elle avait trois cent euros dans les mains cette petite bête. Il l'a retourné dans tous les sens, l'a même croqué. Manu a commencé à escalader et entre temps il a laissé tomber l'objectif, je l'ai vu rebondir sur un rocher pour arriver sur un lit végétal. Une fois récupéré quelques mètres plus bas c'est un miracle, il fonctionne encore. C'est ce que l'on appelle du bon matos.




Nous devions reprendre le bateau dans la matinée, nous avons donc refait nos sacs à dos et profiter des derniers moments que nous avions sur cette île. Je ne sais pas pourquoi mais avec toutes ses histoires et ses légendes elle m'a un peu fait penser à Peter Pan et le Capitaine Crochet. Les Thaïlandais considèrent cette île comme maudite et ils pensent qu'elle est hantée par les âmes des bagnards. C'est vrai que cette île est pour ainsi dire passé d'Alcatraz à l'Eden.



Nous sommes repartis de cette île avec des étoiles plein les yeux, presque un peu émus de la quitter, nous sommes restés muets durant toute la traversée nous ramenant au port de Pak Bara. Des images de cette dense forêt tropicale entourée de plage de sable blanc et de ses crabes qui sortent leur grands yeux quand vient la nuit ; des mangroves et des immenses falaises de basalte. Bref ça c'est du souvenir !

Tendresse et chocolat,

Tifoune

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